lundi 20 mai 2013

Pans'


Une soirée. 3 heures du matin.

Les yeux dans le vague.

J'étais en boîte à Toulouse, assise à table tranquillement avec mes copines et leurs amies, lorsque l'une de celles-ci, un vrai garçon manqué, m'écarta du groupe et me posa une question, d'un air accusateur.

"Toi, je te vois depuis tout à l'heure, tu regardes les mecs, tu regardes les filles, tu regardes les mecs... mais t'es quoi en fait ?"

Comme je ne m'y attendais pas du tout, et que je me cherchais moi-même, j'étais un peu désarçonnée.

"Alors, hétéro, lesbienne...???"

Je haussais les épaules.

"Ben... j'aime les deux. Mais c'est pas simple."

La réponse n'eût pas l'air de lui plaire. Faut dire que ça m'avait l'air pourtant tellement évident.

"Je suis bi, enfin je crois."

"Euh, mais, même si tu es bi, tu as bien une préférence ?"

"Bah nan."

"Mais si !"

"Non. J'aime les filles, comme j'aime les garçons. Les femmes et les hommes. En fait, je me fiche de savoir si les gens ont des seins ou des c*******. Ou s'ils se sentent homme ou femme dans leur tête. Même si ça fait un peu bisounours, je pense aimer les gens pour ce qu'ils sont. Et que c'est ce qu'il faut faire."

Elle me fit des yeux ronds comme des billes comme je n'en avais jamais vu. Puis grogna :

"Mouais. Moi je suis sûre que les bi, en fait, ça existe pas, parce qu'ils toujours ont une préférence, de toute façon. Et quand même, je vois pas comment on peut aimer une fille de la même façon qu'on aime un gars, ils sont quand même pas foutus pareil t'sé, s'pas comme si y'avait aucune différence."

Puis, quelques secondes après, elle rajouta :

"En tout cas, moi je sais pourquoi je suis gouine."

Et elle repartit vers la piste, blasée. Et moi à mon verre, embarrassée, n'osant même plus jeter un oeil autour de moi.

Qu'aurais-je pu lui dire de plus, ne sachant moi-même pas grand chose de mon orientation, du moins ne sachant poser un nom dessus ? Surtout qu'il ne s'agissait que d'une question d'ouverture d'esprit à mes yeux...



Un début de journée. 10 heures du matin.

J'entendais ma mère brailler au téléphone, comme à son habitude.

"Ah ces mecs, tous les mêmes, ça ne pense qu'à leurs webcams coquines et coups d'un soir ! Et puis si tu savais, sur le net, y'a plein de bi ! C'est dégueulasse ! De vrais nids à MST ! J'ai rien contre les homos, par contre les bi... Moi je pourrais jamais sortir ou coucher avec un mec bi ! En sachant qu'ils se protègent pas, qu'ils aiment traîner de gauche à droite, faire des partouzes, enc****, se faire enc****, beurk !"

Le dégoût.



Un après-midi. 5 heures du soir.

Je m'amusais avec mon copain, à lui poser des questions pièges.

"Et si je prenais beaucoup de poids, tu m'aimerais toujours ?"

"Tant que tu ne deviens pas obèse, moi ça me va !"

"Et si je le devenais à cause d'une maladie ?"

"Bon, dans ce cas, là je ferais avec bien sûr."

"Et si je ne portais plus de jupes, ne me maquillais plus, ne me mettais plus en valeur ?"

"Personnellement je m'en ficherais, parce que tu n'as pas besoin de tout ça pour être belle.
Mais comme je me dis que ça ne te ressemblerait pas de ne plus prendre soin de toi..."

Alors, j'osais :

"Et si je changeais de sexe, tu m'aimerais toujours ?"

Un silence très lourd se fît sentir.

"... si tu n'étais plus une femme, je serais bien malheureux. Et puis, je suis pas homo quoi, tu le sais bien."

Dure réalité. Je me sentis bien triste à ce moment-là. Même si ma question n'était bien évidemment qu'un test. Je m'attendais à tout sauf cette réponse.

Parce que moi, je n'étais pas homo non plus, mais je pensais bien l'aimer pour la personne qu'il était, pour sa personnalité, pas pour son sexe, ni même pour son genre. Et je voulais être aimée de la même façon, mais ce n'était de toute évidence pas le cas.

Alors je suis partie. Pour de nombreuses raisons dont celle-ci.

Et plus le temps passait, et plus je me disais que ça ne le serait certainement jamais avec qui que ce soit.



Une nuit. 2 heures du mat'.

Je pense à toi et j'espère.

J'espère que toi tu seras digne de confiance, à côté de tous ces êtres humains pour qui je ne suis qu'une extra-terrestre (ou une emmerdeuse) dès lors que je parle de mes valeurs (ou pas).

J'espère que tu resteras naturel, que tu continueras à me sourire, à me montrer à quel point le monde et la vie peuvent être beaux.

J'espère que tu sauras m'aimer inconditionnellement, que je ne serais pas devenue une étrangère à tes yeux au bout d'un certain temps.

Je crois en la belle personne que tu es.

Je t'aime tellement fort.

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